Article écrit par Jeremy Lamri
L'IA générative pourrait révolutionner l'expérience candidat et collaborateur, en personnalisant les interactions, en accélérant les processus de recrutement et d'intégration, et en proposant des parcours de formation adaptés. Elle offre aussi l'opportunité d'automatiser de nombreuses tâches administratives chronophages, libérant ainsi du temps pour des activités à plus forte valeur ajoutée. Enfin, l'IA générative peut aider les RH à prendre de meilleures décisions, plus objectives et basées sur des données factuelles, que ce soit en matière de recrutement, de gestion des talents ou de planification des effectifs.
Pourtant, force est de constater que l'adoption de l'IA générative reste encore limitée dans le domaine des RH, en comparaison à d'autres fonctions de l'entreprise. Comme le souligne une étude réalisée par Deel sur plus de 1 000 professionnels RH aux Etats-Unis (il n’y a actuellement pas d’étude existante sur le périmètre français, NDLR), seuls 38% déclarent avoir commencé à utiliser l’IA générative dans certaines de leurs pratiques. En France, hormis les cas d’usage typiques des chatbots, de l’aide à la rédaction d’offre d’emploi, et de Secure GPT, les témoignages sur les cas d’usage RH déployés sont pratiquement inexistants, tant sur les réseaux sociaux, que dans la presse ou les tables rondes sur le sujet.
L'IA générative pourrait révolutionner l'expérience candidat et collaborateur, en personnalisant les interactions, en accélérant les processus de recrutement et d'intégration, et en proposant des parcours de formation adaptés. Elle offre aussi l'opportunité d'automatiser de nombreuses tâches administratives chronophages, libérant ainsi du temps pour des activités à plus forte valeur ajoutée. Enfin, l'IA générative peut aider les RH à prendre de meilleures décisions, plus objectives et basées sur des données factuelles, que ce soit en matière de recrutement, de gestion des talents ou de planification des effectifs.
Pourtant, force est de constater que l'adoption de l'IA générative reste encore limitée dans le domaine des RH, en comparaison à d'autres fonctions de l'entreprise. Comme le souligne une étude réalisée par Deel sur plus de 1 000 professionnels RH aux Etats-Unis (il n’y a actuellement pas d’étude existante sur le périmètre français, NDLR), seuls 38% déclarent avoir commencé à utiliser l’IA générative dans certaines de leurs pratiques. En France, hormis les cas d’usage typiques des chatbots, de l’aide à la rédaction d’offre d’emploi, et de Secure GPT, les témoignages sur les cas d’usage RH déployés sont pratiquement inexistants, tant sur les réseaux sociaux, que dans la presse ou les tables rondes sur le sujet.
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1- Le défi de la confidentialité et
de la sécurité des données - 2- Le défi éthique et juridique
- 3- Le défi de la qualité des pratiques et des données
- 4- Le défi des compétences en IA chez les RH
- 5- Le défi de la quantification de la valeur et de l'adhésion culturelle
La nature hautement sensible et confidentielle des données RH constitue l’un des principaux défis pour l’adoption de l’IA générative dans ce domaine. Les données RH incluent des informations personnelles détaillées sur les employés, telles que leur état civil, leur adresse, leur rémunération, leurs évaluations de performance ou encore leur historique médical. En Europe, ces données sont soumises à des réglementations strictes en matière de protection de la vie privée par le RGPD.
Mais le RGPD seul ne suffira pas à protéger certaines données
Un modèle d’IA nécessite une grande quantité de données pour être performant. D’ici quelques mois ou années, de nombreuses entreprises seront dotées de systèmes capables d’analyser les performances de leurs collaborateurs, de prédire les risques de départ, et même de suggérer des augmentations de salaire. Ces IA seront nécessairement alimentées par une mine d’informations sensibles : évaluations, historiques de rémunération, données de productivité, et bien plus encore. Et plus il y aura d’IA dans les outils, plus il y aura de failles potentielles à exploiter. Des acteurs malveillants pourraient parvenir à exploiter ces failles pour extraire des informations confidentielles.
Par exemple, un concurrent pourrait utiliser des techniques avancées pour déduire les niveaux de salaire de vos meilleurs talents, facilitant ainsi le débauchage. Ou encore, un employé mécontent pourrait effectuer une série de requêtes pour tenter de mettre en évidence les critères réellement utilisés pour les augmentations et les promotions, dans le but de remettre en question l’équité des processus RH. Des cas similaires ont déjà été observés dans d’autres secteurs, comme en 2020 lorsque des chercheurs ont réussi à extraire des données personnelles d’un modèle d’IA entraîné sur des dossiers médicaux.
Pour relever ce défi, il sera nécessaire de mettre en place des mesures de protection renforcées pour tous les processus utilisant des IA. Cela passe par des techniques avancées d’anonymisation et de chiffrement des données, par des contrôles d’accès stricts aux modèles d’IA et aux données d’entraînement, ainsi que par des audits réguliers de sécurité. Il est également important d’obtenir le consentement éclairé des collaborateurs et d’être transparent sur l’utilisation de leurs données dans des systèmes d’IA, comme le recommandent les lignes directrices éthiques de la Commission européenne en 2023 pour une IA de confiance. Rien d’insurmontable à ce stade, mais il s’agit là d’un défi suffisant pour temporiser les déploiements à l’échelle d’outils d’intelligence artificielle dans les RH.
L’utilisation de l’IA générative pour automatiser ou assister les décisions RH, telles que le recrutement, la promotion ou le licenciement, soulève d’importantes questions éthiques et juridiques. L’un des risques majeurs est que les algorithmes reproduisent, voire amplifient, les biais discriminatoires présents dans les données d’entraînement, comme cela a pu être le cas avec l’exemple notoire mais apprenant d’Amazon, il y a quelques années.
Ces biais algorithmes peuvent avoir un impact négatif sur l’équité et la diversité au sein des organisations. L’utilisation systématique d’un système de recrutement biaisé pourrait réduire la représentation des femmes et des minorités dans une entreprise. Pour prévenir ces risques, les entreprises doivent mettre en place des processus rigoureux de détection et de correction des biais à toutes les étapes du cycle de vie des modèles d’intelligence artificielle, de la collecte des données à la surveillance post-déploiement.
Certaines villes comme New York ont commencé à légiférer pour imposer des audits de biais aux outils de recrutement IA
Un autre défi est le manque de maturité du cadre légal de l’utilisation de l’IA dans les décisions RH. Les lois anti-discrimination existantes, conçues pour des décisions humaines, sont souvent mal adaptées aux spécificités de l’IA. Aux Etats-Unis, certaines villes comme New York ont commencé à légiférer pour imposer des audits de biais aux outils de recrutement IA, mais il n’existe pas encore de standard national ni international.
Enfin, l’utilisation de l’IA générative dans les RH soulève la question de la place de l’humain dans la prise de décision. Confier des décisions importantes à des algorithmes sans supervision humaine pose des problèmes éthiques et peut nuire à l’acceptabilité de ces systèmes. Il est fondamental de concevoir des approches hybrides “humain-dans-la-boucle”, où l’IA vient assister et augmenter le jugement humain, plutôt que le remplacer. Les RH doivent aussi développer leurs compétences en “littératie de l’IA”, pour être capables d’interagir de manière critique et éclairée avec ces technologies
Pour donner des résultats pertinents et fiables, les modèles d’IA générative ont besoin d’être entraînés sur des données de qualité, complètes, cohérentes et à jour. Or, dans de nombreuses organisations, les données RH sont encore dispersées dans de multiples systèmes (SIRH, outils de recrutement, LMS, etc.), dans des formats hétérogènes et avec des niveaux de qualité variables.
Cette fragmentation des données RH s’explique en partie par le manque de standardisation des processus RH entre les entreprises, voire entre les départements d’une même entreprise. Contrairement à d’autres fonctions comme la finance ou la logistique, les RH ont peu de normes et de bonnes pratiques formalisées au niveau intra ou inter-entreprises. Chaque organisation a ses propres processus et outils de gestion des RH, adaptés à sa culture et à ses besoins spécifiques. Cette variabilité rend difficile le développement de solutions d’IA générique et nécessite un effort important de personnalisation.
Il faut une collaboration étroite entre les équipes RH, IT et data
Pour permettre cette personnalisation, il n’y aura pas de raccourci possible, et les entreprises devront engager un travail de fond pour harmoniser et améliorer la qualité de leurs données RH, avant de pouvoir les exploiter dans des modèles d’IA. Cela passera a minima par la définition d’un modèle de données unifié, l’implémentation de processus de gouvernance des données, et le nettoyage et l’enrichissement continus des données. Il s’agit d’un chantier chronophage mais indispensable, qui nécessitera une collaboration étroite entre les équipes RH, IT et data.
Au-delà des données, il est aussi nécessaire de travailler sur la standardisation et la formalisation des processus RH, afin de faciliter leur automatisation et leur optimisation par l’IA. Cela peut passer par l’adoption de repères normatifs et de bonnes pratiques RH éprouvées, comme les normes ISO 30400 pour le management des ressources humaines. Les entreprises ont aussi intérêt à collaborer et à partager leurs expériences au sein de communautés de pratique inter-entreprises, pour faire émerger des standards et des solutions d’IA mutualisées, qui pourraient constituer des bases de travail saines pour cadrer le fonctionnement de l’IA.
De manière plus pragmatique encore, lorsque l’on évoque les principaux obstacles à l’adoption de l’IA générative dans les RH, il existe un constat implacable : la fonction RH manque de compétences en IA et en science des données au sein de ses équipes, notamment par rapport aux fonctions IT et marketing, souvent mieux équipées en la matière. Selon une étude du Boston Consulting Group de 2023, ces compétences sont pourtant au cœur de la création de valeur dans la fonction RH. Les RH ont traditionnellement des profils plus orientés vers les sciences humaines et sociales, et manquent souvent de formation en informatique et en statistiques.
Pour combler ce gap de compétences, les équipes RH doivent collaborer étroitement avec les équipes IT et data de leur organisation. La réussite des projets d’IA dans les RH nécessite une approche multidisciplinaire, combinant une expertise métier RH avec des compétences techniques en développement d’algorithmes et en gestion des données. Les RH doivent aussi investir dans la montée en compétences de leurs équipes, à travers des programmes de formation et de certification en IA et en analyse de données.
85% des projets d’IA dans les RH n’atteindront pas les résultats escomptés d’ici à fin 2024
Une autre option est de s’appuyer sur des partenaires externes, comme des éditeurs de logiciels RH, des cabinets de conseil ou des start-ups spécialisées, pour accéder à une expertise IA pointue. Cependant, le marché des solutions d’IA générative pour les RH est encore émergent et fragmenté. Beaucoup de solutions sont encore immatures, peu évolutives et mal adaptées aux besoins spécifiques de chaque entreprise. Selon une enquête de Gartner datant de 2023, 85% des projets d’IA dans les RH n’atteindront pas les résultats escomptés d’ici à fin 2024, faute de solutions adéquates sur le marché.
Pour relever ce défi, les entreprises doivent être sélectives dans le choix de leurs partenaires IA et privilégier des solutions éprouvées, scalables et personnalisables. Il est crucial d’impliquer les équipes RH dans le processus de sélection et de co-construire les solutions avec les partenaires, afin de garantir leur adéquation aux besoins métiers. Les entreprises peuvent aussi envisager des approches progressives, en commençant par des cas d’usage simples et à forte valeur ajoutée, avant d’étendre l’IA à des processus RH plus complexes.
Démontrer la valeur ajoutée des solutions d’IA générative pour les RH est un défi majeur pour justifier les investissements nécessaires. Si les bénéfices potentiels sont réels, comme l’amélioration de l’expérience candidat et collaborateur, ou l’automatisation des tâches administratives ou l’aide à la décision, ils sont souvent difficiles à quantifier précisément en termes de ROI, faute d’indicateurs existants pour comparer. D’ailleurs, une étude de McKinsey de 2024 montre que la fonction RH a le plus faible de taux de répondants dans leur étude sur l’analyse des gains générés par l’IA générative. En revanche, cette même étude positionne la fonction RH avec le plus fort taux de répondants sur la réduction des coûts, plus directement mesurable.
Cette difficulté à chiffrer la valeur de l’IA explique en partie pourquoi la transformation digitale des RH n’est souvent pas une priorité d’investissement pour les entreprises. Dans un contexte budgétaire souvent contraint, les projets d’IA dans les RH peinent à obtenir des financements face à des initiatives jugées plus critiques ou au ROI plus immédiat.
52% des collaborateurs considèrent que l’IA provoquera des biais susceptibles de les désavantager
Au-delà des aspects financiers, l’adoption de l’IA générative dans les RH se heurte aussi à des réticences culturelles. Beaucoup craignent une “déshumanisation” des RH et une perte de la dimension humaine et empathique dans la relation avec les collaborateurs. L’idée de confier des décisions RH importantes, comme le recrutement ou la gestion des talents, à des algorithmes plutôt qu’au jugement humain suscite de la méfiance. Selon une étude de PWC de 2024, 52% des collaborateurs considèrent que l’IA provoquera des biais susceptibles de les désavantager, et 47% estiment que l’IA viendra modifier négativement leur métier.
Pour surmonter ces freins, les organisations vont devoir adopter une approche progressive et centrée sur l’humain dans leur déploiement de l’IA générative. Il semble nécessaire de se focaliser sur des cas d’usage à forte valeur ajoutée, où l’IA vient augmenter les capacités humaines plutôt que les remplacer, et de mesurer rigoureusement leur impact, ce qui est loin d’être le cas pour le moment. La conduite du changement et la formation des équipes RH sont clés pour démystifier l’IA, rassurer sur ses apports et faire évoluer les mentalités. Enfin, la transparence et l’éthique doivent être au cœur de la stratégie IA pour instaurer un climat de confiance avec les collaborateurs, que ce soit au travers d’une charte éthique ou de la mise à disposition de tableaux de bord éthiques.
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1- Le défi de la confidentialité et
de la sécurité des données - 2- Le défi éthique et juridique
- 3- Le défi de la qualité des pratiques et des données
- 4- Le défi des compétences en IA chez les RH
- 5- Le défi de la quantification de la valeur et de l'adhésion culturelle
La nature hautement sensible et confidentielle des données RH constitue l’un des principaux défis pour l’adoption de l’IA générative dans ce domaine. Les données RH incluent des informations personnelles détaillées sur les employés, telles que leur état civil, leur adresse, leur rémunération, leurs évaluations de performance ou encore leur historique médical. En Europe, ces données sont soumises à des réglementations strictes en matière de protection de la vie privée par le RGPD.
Mais le RGPD seul ne suffira pas à protéger certaines données
Un modèle d’IA nécessite une grande quantité de données pour être performant. D’ici quelques mois ou années, de nombreuses entreprises seront dotées de systèmes capables d’analyser les performances de leurs collaborateurs, de prédire les risques de départ, et même de suggérer des augmentations de salaire. Ces IA seront nécessairement alimentées par une mine d’informations sensibles : évaluations, historiques de rémunération, données de productivité, et bien plus encore. Et plus il y aura d’IA dans les outils, plus il y aura de failles potentielles à exploiter. Des acteurs malveillants pourraient parvenir à exploiter ces failles pour extraire des informations confidentielles.
Par exemple, un concurrent pourrait utiliser des techniques avancées pour déduire les niveaux de salaire de vos meilleurs talents, facilitant ainsi le débauchage. Ou encore, un employé mécontent pourrait effectuer une série de requêtes pour tenter de mettre en évidence les critères réellement utilisés pour les augmentations et les promotions, dans le but de remettre en question l’équité des processus RH. Des cas similaires ont déjà été observés dans d’autres secteurs, comme en 2020 lorsque des chercheurs ont réussi à extraire des données personnelles d’un modèle d’IA entraîné sur des dossiers médicaux.
Pour relever ce défi, il sera nécessaire de mettre en place des mesures de protection renforcées pour tous les processus utilisant des IA. Cela passe par des techniques avancées d’anonymisation et de chiffrement des données, par des contrôles d’accès stricts aux modèles d’IA et aux données d’entraînement, ainsi que par des audits réguliers de sécurité. Il est également important d’obtenir le consentement éclairé des collaborateurs et d’être transparent sur l’utilisation de leurs données dans des systèmes d’IA, comme le recommandent les lignes directrices éthiques de la Commission européenne en 2023 pour une IA de confiance. Rien d’insurmontable à ce stade, mais il s’agit là d’un défi suffisant pour temporiser les déploiements à l’échelle d’outils d’intelligence artificielle dans les RH.
L’utilisation de l’IA générative pour automatiser ou assister les décisions RH, telles que le recrutement, la promotion ou le licenciement, soulève d’importantes questions éthiques et juridiques. L’un des risques majeurs est que les algorithmes reproduisent, voire amplifient, les biais discriminatoires présents dans les données d’entraînement, comme cela a pu être le cas avec l’exemple notoire mais apprenant d’Amazon, il y a quelques années.
Ces biais algorithmes peuvent avoir un impact négatif sur l’équité et la diversité au sein des organisations. L’utilisation systématique d’un système de recrutement biaisé pourrait réduire la représentation des femmes et des minorités dans une entreprise. Pour prévenir ces risques, les entreprises doivent mettre en place des processus rigoureux de détection et de correction des biais à toutes les étapes du cycle de vie des modèles d’intelligence artificielle, de la collecte des données à la surveillance post-déploiement.
Certaines villes comme New York ont commencé à légiférer pour imposer des audits de biais aux outils de recrutement IA
Un autre défi est le manque de maturité du cadre légal de l’utilisation de l’IA dans les décisions RH. Les lois anti-discrimination existantes, conçues pour des décisions humaines, sont souvent mal adaptées aux spécificités de l’IA. Aux Etats-Unis, certaines villes comme New York ont commencé à légiférer pour imposer des audits de biais aux outils de recrutement IA, mais il n’existe pas encore de standard national ni international.
Enfin, l’utilisation de l’IA générative dans les RH soulève la question de la place de l’humain dans la prise de décision. Confier des décisions importantes à des algorithmes sans supervision humaine pose des problèmes éthiques et peut nuire à l’acceptabilité de ces systèmes. Il est fondamental de concevoir des approches hybrides “humain-dans-la-boucle”, où l’IA vient assister et augmenter le jugement humain, plutôt que le remplacer. Les RH doivent aussi développer leurs compétences en “littératie de l’IA”, pour être capables d’interagir de manière critique et éclairée avec ces technologies
Pour donner des résultats pertinents et fiables, les modèles d’IA générative ont besoin d’être entraînés sur des données de qualité, complètes, cohérentes et à jour. Or, dans de nombreuses organisations, les données RH sont encore dispersées dans de multiples systèmes (SIRH, outils de recrutement, LMS, etc.), dans des formats hétérogènes et avec des niveaux de qualité variables.
Cette fragmentation des données RH s’explique en partie par le manque de standardisation des processus RH entre les entreprises, voire entre les départements d’une même entreprise. Contrairement à d’autres fonctions comme la finance ou la logistique, les RH ont peu de normes et de bonnes pratiques formalisées au niveau intra ou inter-entreprises. Chaque organisation a ses propres processus et outils de gestion des RH, adaptés à sa culture et à ses besoins spécifiques. Cette variabilité rend difficile le développement de solutions d’IA générique et nécessite un effort important de personnalisation.
Il faut une collaboration étroite entre les équipes RH, IT et data
Pour permettre cette personnalisation, il n’y aura pas de raccourci possible, et les entreprises devront engager un travail de fond pour harmoniser et améliorer la qualité de leurs données RH, avant de pouvoir les exploiter dans des modèles d’IA. Cela passera a minima par la définition d’un modèle de données unifié, l’implémentation de processus de gouvernance des données, et le nettoyage et l’enrichissement continus des données. Il s’agit d’un chantier chronophage mais indispensable, qui nécessitera une collaboration étroite entre les équipes RH, IT et data.
Au-delà des données, il est aussi nécessaire de travailler sur la standardisation et la formalisation des processus RH, afin de faciliter leur automatisation et leur optimisation par l’IA. Cela peut passer par l’adoption de repères normatifs et de bonnes pratiques RH éprouvées, comme les normes ISO 30400 pour le management des ressources humaines. Les entreprises ont aussi intérêt à collaborer et à partager leurs expériences au sein de communautés de pratique inter-entreprises, pour faire émerger des standards et des solutions d’IA mutualisées, qui pourraient constituer des bases de travail saines pour cadrer le fonctionnement de l’IA.
De manière plus pragmatique encore, lorsque l’on évoque les principaux obstacles à l’adoption de l’IA générative dans les RH, il existe un constat implacable : la fonction RH manque de compétences en IA et en science des données au sein de ses équipes, notamment par rapport aux fonctions IT et marketing, souvent mieux équipées en la matière. Selon une étude du Boston Consulting Group de 2023, ces compétences sont pourtant au cœur de la création de valeur dans la fonction RH. Les RH ont traditionnellement des profils plus orientés vers les sciences humaines et sociales, et manquent souvent de formation en informatique et en statistiques.
Pour combler ce gap de compétences, les équipes RH doivent collaborer étroitement avec les équipes IT et data de leur organisation. La réussite des projets d’IA dans les RH nécessite une approche multidisciplinaire, combinant une expertise métier RH avec des compétences techniques en développement d’algorithmes et en gestion des données. Les RH doivent aussi investir dans la montée en compétences de leurs équipes, à travers des programmes de formation et de certification en IA et en analyse de données.
85% des projets d’IA dans les RH n’atteindront pas les résultats escomptés d’ici à fin 2024
Une autre option est de s’appuyer sur des partenaires externes, comme des éditeurs de logiciels RH, des cabinets de conseil ou des start-ups spécialisées, pour accéder à une expertise IA pointue. Cependant, le marché des solutions d’IA générative pour les RH est encore émergent et fragmenté. Beaucoup de solutions sont encore immatures, peu évolutives et mal adaptées aux besoins spécifiques de chaque entreprise. Selon une enquête de Gartner datant de 2023, 85% des projets d’IA dans les RH n’atteindront pas les résultats escomptés d’ici à fin 2024, faute de solutions adéquates sur le marché.
Pour relever ce défi, les entreprises doivent être sélectives dans le choix de leurs partenaires IA et privilégier des solutions éprouvées, scalables et personnalisables. Il est crucial d’impliquer les équipes RH dans le processus de sélection et de co-construire les solutions avec les partenaires, afin de garantir leur adéquation aux besoins métiers. Les entreprises peuvent aussi envisager des approches progressives, en commençant par des cas d’usage simples et à forte valeur ajoutée, avant d’étendre l’IA à des processus RH plus complexes.
Démontrer la valeur ajoutée des solutions d’IA générative pour les RH est un défi majeur pour justifier les investissements nécessaires. Si les bénéfices potentiels sont réels, comme l’amélioration de l’expérience candidat et collaborateur, ou l’automatisation des tâches administratives ou l’aide à la décision, ils sont souvent difficiles à quantifier précisément en termes de ROI, faute d’indicateurs existants pour comparer. D’ailleurs, une étude de McKinsey de 2024 montre que la fonction RH a le plus faible de taux de répondants dans leur étude sur l’analyse des gains générés par l’IA générative. En revanche, cette même étude positionne la fonction RH avec le plus fort taux de répondants sur la réduction des coûts, plus directement mesurable.
Cette difficulté à chiffrer la valeur de l’IA explique en partie pourquoi la transformation digitale des RH n’est souvent pas une priorité d’investissement pour les entreprises. Dans un contexte budgétaire souvent contraint, les projets d’IA dans les RH peinent à obtenir des financements face à des initiatives jugées plus critiques ou au ROI plus immédiat.
52% des collaborateurs considèrent que l’IA provoquera des biais susceptibles de les désavantager
Au-delà des aspects financiers, l’adoption de l’IA générative dans les RH se heurte aussi à des réticences culturelles. Beaucoup craignent une “déshumanisation” des RH et une perte de la dimension humaine et empathique dans la relation avec les collaborateurs. L’idée de confier des décisions RH importantes, comme le recrutement ou la gestion des talents, à des algorithmes plutôt qu’au jugement humain suscite de la méfiance. Selon une étude de PWC de 2024, 52% des collaborateurs considèrent que l’IA provoquera des biais susceptibles de les désavantager, et 47% estiment que l’IA viendra modifier négativement leur métier.
Pour surmonter ces freins, les organisations vont devoir adopter une approche progressive et centrée sur l’humain dans leur déploiement de l’IA générative. Il semble nécessaire de se focaliser sur des cas d’usage à forte valeur ajoutée, où l’IA vient augmenter les capacités humaines plutôt que les remplacer, et de mesurer rigoureusement leur impact, ce qui est loin d’être le cas pour le moment. La conduite du changement et la formation des équipes RH sont clés pour démystifier l’IA, rassurer sur ses apports et faire évoluer les mentalités. Enfin, la transparence et l’éthique doivent être au cœur de la stratégie IA pour instaurer un climat de confiance avec les collaborateurs, que ce soit au travers d’une charte éthique ou de la mise à disposition de tableaux de bord éthiques.
Une accélération à la mi-2025
L’adoption de l’IA générative dans les RH se heurte encore à des défis majeurs qui expliquent son retard par rapport à d’autres fonctions de l’entreprise. Cependant, malgré ces obstacles tous surmontables, l’IA générative offre des opportunités de transformation considérables pour les RH et la gestion des talents plus généralement. Elle promet d’améliorer l’expérience candidat et collaborateur, d’automatiser les tâches administratives chronophages, d’apporter une aide précieuse à la décision et in fine, de renforcer la performance et l’agilité des organisations. Avec la maturation progressive du marché de l’IA, la montée en puissance des réglementations éthiques, et les progrès dans la gouvernance des données RH, on peut s’attendre à une accélération de l’adoption de l’IA générative dans les RH dans les années à venir, probablement à partir de mi-2025.
Pour ne pas rater ce virage stratégique, les DRH doivent dès maintenant préparer leur organisation, leurs équipes et surtout formaliser leurs bonnes pratiques repensées à l’ère de l’IA. Cela passe par le développement des compétences en IA et en science des données appliquées à l’humain, à travers des programmes de formation et de recrutement ciblés. La mise en qualité et la gouvernance des données RH est un autre chantier prioritaire, pour constituer le socle indispensable aux projets d’IA. Les DRH doivent aussi initier une réflexion stratégique sur les cas d’usage de l’IA les plus porteurs de valeur pour leurs enjeux spécifiques, et sur les impacts humains, éthiques et sociaux de ces technologies.
Une accélération à la mi-2025
L’adoption de l’IA générative dans les RH se heurte encore à des défis majeurs qui expliquent son retard par rapport à d’autres fonctions de l’entreprise. Cependant, malgré ces obstacles tous surmontables, l’IA générative offre des opportunités de transformation considérables pour les RH et la gestion des talents plus généralement. Elle promet d’améliorer l’expérience candidat et collaborateur, d’automatiser les tâches administratives chronophages, d’apporter une aide précieuse à la décision et in fine, de renforcer la performance et l’agilité des organisations. Avec la maturation progressive du marché de l’IA, la montée en puissance des réglementations éthiques, et les progrès dans la gouvernance des données RH, on peut s’attendre à une accélération de l’adoption de l’IA générative dans les RH dans les années à venir, probablement à partir de mi-2025.
Pour ne pas rater ce virage stratégique, les DRH doivent dès maintenant préparer leur organisation, leurs équipes et surtout formaliser leurs bonnes pratiques repensées à l’ère de l’IA. Cela passe par le développement des compétences en IA et en science des données appliquées à l’humain, à travers des programmes de formation et de recrutement ciblés. La mise en qualité et la gouvernance des données RH est un autre chantier prioritaire, pour constituer le socle indispensable aux projets d’IA. Les DRH doivent aussi initier une réflexion stratégique sur les cas d’usage de l’IA les plus porteurs de valeur pour leurs enjeux spécifiques, et sur les impacts humains, éthiques et sociaux de ces technologies.